vendredi 25 juin 2010

« Je suis incapable de mentir »

Neagu Djuvara

« Je suis incapable de mentir » _______________________________________________________________________________________

regard n°32 | 17 octobre 2007


Mardi 12 septembre, 19h45. Une petite rue pleine de charme parallèle au Boulevard Dacia, non loin de l’Institut français. Neagu Djuvara nous reçoit chez lui. L’appartement ancien, aussi coquet que son locataire, est jonché de cartons: le déménagement est encore frais. L’homme vient de terminer son après-midi de travail et nous gratifie d’un imparfait du subjonctif souriant pour nous remercier de notre ponctualité. La conversation s’engage dans le salon et se poursuivra dans un restaurant bucarestois. Elle durera plus de trois heures.

Entretien réalisé par Jean-François Pérès






regard – Peut-on dire que votre vie, sur laquelle nous allons longuement revenir, est une suite de coïncidences extraordinaires, de miracles même?

Neagu Djuvara : Je me défends toujours quand on me dit: «Vous avez eu une vie extraordinaire!» Je n’y suis presque pour rien. Tout est venu comme ça, par des hasards. J’ai récemment donné un entretien à une revue roumaine qui s’appelle «Carrières». Je leur ai rétorqué que je suis pourtant un exemple type d’anti-carrière, ça les a beaucoup amusés.

regard – Comme nombre d’enfants de grande famille de votre génération, vous avez fait la majeure partie de vos études en France.

ND : Les familles de boyards, ou de la grande bourgeoisie, étaient déjà habituées à envoyer leurs enfants en France. Mon arrière-grand-père s’était réfugié à Paris en 1848. Mon grand-père a passé le «bacho» au lycée Henri-IV, et son frère Alexandru à Louis-le-Grand. Ce dernier a même fait de la peinture à Barbizon dans les années 1880 avant de se lancer en politique. C’était un bon peintre post-impressionniste. Mon grand-père, diplomate de carrière, a envoyé ses deux fils à Berlin pour faire plaisir au roi Charles 1er. En fait, il était anti-allemand, et l’affaire s’est terminée… au lycée français. Mon père est sorti major de l’école polytechnique de Berlin en 1906. Il est mort en 1918. J’étais orphelin de guerre, et ma mère n’avait plus les moyens de tenir son rang dans la bonne société bucarestoise avec ses deux enfants, veuve et sans revenus, notre père mort, nos terres expropriées… Elle a pensé que, comme les autres générations, je devais faire mes études en France. C’est ainsi qu’à l’âge de 12 ans j’ai été interne au lycée de Nice. Quatre ans plus tard, nous avons déménagé à Paris. J’ai été inscrit au lycée Janson de Sailly. L’histoire était déjà ma passion. Mais je me suis rendu compte que je ne pouvais pas en vivre, et j’ai fait en même temps du droit. Quand j’ai fini mes deux licences, j’ai poussé jusqu’au doctorat en droit.

regard - Vous soutenez votre thèse à Paris en juin 1940, le jour même où le front est percé à Dunkerque.

ND : C’était très émouvant. Dans la rue, on entendait des mégaphones donner les nouvelles du front, et en face de moi, mon professeur en robe, digne, officiel, comme si de rien n’était... Quel décalage. Six jours après, nous traversons en train la frontière yougoslave et apprenons que l’Italie entre en guerre, qu’elle ferme ses frontières... Tout ça, ce sont des accidents dans ma vie. Sur le moment, des émotions fortes, de la peur. Mais après, finalement, c’est assez pittoresque.


« Je n’ai jamais considéré Bucarest comme une capitale de type occidental »



regard - En 1917, déjà, votre famille et vous-mêmes aviez quitté la Russie in extremis…

ND : Le 7 novembre 1917. A cause de la guerre, nous avions quitté Bucarest pour Iasi, et ma mère voulait que nous retrouvions mon grand-père au Havre. On a été retenu à Saint-Pétersbourg pendant un mois parce que notre gouvernante portait un nom qui ressemblait à celui d’une espionne allemande recherchée. La police avait retenu nos passeports. Grâce à diverses interventions, roumaines, françaises, ma mère est reçue par le directeur du service des passeports qui s’excuse pour la confusion et lui dit: «Revenez demain matin de bonne heure prendre vos passeports, les Bolcheviques vont prendre le pouvoir». Elle quitte l’hôtel le lendemain. Elle récupère les passeports, veut traverser la Neva, mais tous les ponts sont occupés par l’Armée rouge. Elle aperçoit un officier, lui court après et lui demande en français de l’aider à franchir le pont. L’autre la regarde d’un air sévère et lui répond, toujours en français: «Vous êtes Française, madame?» L’air sévère la fait hésiter. Que doit-elle répondre? Fidèle à son principe de toujours dire la vérité, elle répond: «Non, monsieur, je suis Roumaine». Le type se radoucit, lui dit quelque chose comme: «Ah, ces pauvres Roumains, c’est nous qui les avons entraînés dans ce malheur…» et, courageusement, alors qu’il n’a plus vraiment d’autorité sur les soldats en place, retourne sur ses pas et commence à parlementer, prenant la cause de cette mère de famille que ses enfants attendent... Heureusement, les Russes sont sensibles aux histoires d’enfants. Le passage s’ouvre, et c’est comme ça que nous avons pris le fiacre du mari de la servante de l’hôtel pour arriver à la gare de Saint-Pétersbourg et prendre un train pour Helsinki, puis la Norvège, la Suède, l’Ecosse et la France… J’avais un an et trois mois. Cette histoire m’a appris une chose, c’est qu’il faut toujours dire la vérité. Aujourd’hui encore, je suis incapable de mentir, ce qui est quelquefois désagréable dans la vie mondaine.

regard - A partir du moment où vous faites vos études en France, quels sont vos rapports avec la Roumanie ? ?

ND : Je venais environ quatre mois chaque été. Je les passais surtout à la campagne, ce qui fait que j’ai conservé une langue roumaine assez proche du terroir. Nous n’avions plus aucune maison, j’allais chez une soeur ou une cousine de ma mère. Nous ne possédions plus que quarante hectares à cause des grandes expropriations d’après-guerre, ça ne faisait pas beaucoup pour vivre. On allait de temps en temps dans notre village, à Cojasca, entre Bucarest et Targoviste, et sur nos terres en métayage, à Finta.

regard - Gardez-vous une nostalgie particulière pour le «Petit Paris», tel qu’on surnommait Bucarest à l’époque ?

ND : Bucarest était sympathique, mais ayant vécu depuis l’âge de douze ans en France et visité de nombreuses villes d’Europe de l’Ouest, j’avais des éléments de comparaison et je n’ai jamais aimé Bucarest à cause de ça. Je ne l’ai jamais considérée comme une capitale de style occidental. Au fond, ce sont les énormes travaux de Ceausescu qui lui ont donné des airs de capitale. Dans le Bucarest des années 30, il y avait Calea Victoriei et quelques boulevards, mais dès qu’on sortait du centre, ces petites rues avec ces maisons dépareillées... Personnellement, je ne trouvais pas ça beau.

regard - Et l’atmosphère ?

ND : Elle était sympathique. Les gens dans la rue n’avaient pas l’air malheureux, même ceux qui étaient en costume de paysan. Ils n’étaient pas hargneux comme aujourd’hui. Il y a eu un changement du profil ethnique des Roumains à cause du communisme, vraiment. Mes compatriotes sont autres que ceux que j’ai connus dans ma jeunesse.

regard - Votre thèse en droit soutenue, la guerre arrive, la Roumanie est d’abord l’alliée du Reich. Vous restez presque trois ans sous les drapeaux.

ND : D’abord une année de service militaire qui n’a pas été achevée, car on a tout de suite été envoyé au front, quelques jours avant la déclaration de guerre. Antonescu a su par les Allemands qu’ils allaient attaquer. On a garni le front du Prut pour commencer les combats. J’étais alors en manœuvre à Valenii de Munte, le seul moment agréable de cette période. J’ai ensuite été envoyé dans un régiment d’artillerie lourde, avec des mitrailleuses, des lance-roquettes et des petits canons théoriquement anti-char. Je dis «théoriquement» car les deux que j’ai eus au début de la guerre étaient des canons russes de… 1876. C’est pendant la marche de 750 kilomètres jusqu’en Transnistrie qu’on a reçu deux canons modernes, un français et un suédois.

regard - Vous avez été blessé près d’Odessa.

ND : A une trentaine de kilomètres au nord de la ville. J’ai eu une veine folle de n’être que légèrement blessé ici (NDLR, il montre le haut de sa main gauche). On voit encore les traces. C’est entré par là, c’est sorti par ici, mais comme il y a beaucoup de veines, ça a saigné énormément. On m’a fait tout de suite un garrot et au bout d’une heure, on m’a dit de me débrouiller. J’ai marché dix heures. On recevait des coups de feu de toutes parts. J’avise d’abord un médecin qui, le pauvre, se cachait dans un trou et n’a même pas eu l’idée de défaire mon garrot. C’est moi-même qui l’ai défait quelques minutes plus tard, je n’en pouvais plus. Finalement je suis arrivé à une station d’ambulance, direction Chisinau. J’ai eu beaucoup de chance de quitter mon régiment au moment où il a été absolument... décimé. Ce n’est même pas le mot adéquat car il signifie tuer un sur dix. A la veille de l’entrée dans la ville, notre régiment ne comptait plus que 92 soldats valides sur 3000.

regard - C’était une boucherie…

ND : C’est l’une des folies du commandement roumain et d’Antonescu en personne. Les Allemands n’avaient pas demandé que l’on prenne Odessa, ils avaient juste demandé qu’on empêche l’Armée rouge de sortir d’Odessa. Eux avaient des navires, toutes sortes d’atouts... La deuxième guerre mondiale a prouvé que même les plus formidables armées ne prenaient pas facilement une ville. Les Allemands n’ont réussi à prendre ni Moscou, ni Saint-Pétersbourg, ni Stalingrad (aujourd’hui Volgograd, NDLR). On ne prend pas une ville, parce que chaque maison est un bastion. Alors le faire avec des troupes insuffisamment armées comme les nôtres... Il y a eu là-bas, j’ai vu les chiffres, 17000 morts et 65000 blessés roumains. Pour des prunes.

« Une grande partie de la jeunesse roumaine a été envoûtée par le charisme de Codreanu »

regard - Vous vous mariez en 1937 à France, une Française comme son nom l’indique. Grâce à elle, vous vous retrouvez au ministère des Affaires étrangères… sans l’avoir vraiment voulu.

ND : J’étais instructeur des recrues à Bucarest. C’était ennuyeux, mais moins dramatique que de se trouver à Stalingrad, où j’avais peur d’être envoyé. Un jour, France rencontre sur Calea Victoriei un de mes amis, Camil Demetrescu, qui était depuis cinq ans au ministère des Affaires étrangères. Par le plus grand des hasards, il était à la direction du Chiffre et du cabinet. Il lui dit: «Pourquoi Neagu ne se présenterait-il pas au concours d’entrée au ministère?» J’avais un grand-père et un oncle diplomates de carrière et tous les deux m’avaient dégoûté de la diplomatie. Moi, je voulais être professeur d’université, finir éventuellement un second doctorat dans le domaine de l’histoire ou de la philosophie de l’histoire, ça me trottait déjà dans la tête. Mais la nuit portant conseil, j’échafaude des scénarios. Je me dis qu’on risque de perdre la guerre, que la gauche va prendre le pouvoir et faire de nouvelles expropriations… Or je comptais sur mes terres pour me consacrer sans souci à mon second doctorat. Alors tant pis, me dis-je, je vais devenir fonctionnaire. Je n’ai eu que le week-end de Pâques pour me préparer. Et voilà que je réussis, troisième sur quatre-vingt quatre. Et que mon ami Demetrescu s’arrange pour que je sois affecté à cette direction du Chiffre et du cabinet, la seule qui avait de l’influence sur l’état-major. Un jour, le lieutenant-colonel chef du personnel des armées souhaite me voir. Je me demandais ce qui allait encore m’arriver. Souriant, il me tend un papier de couleur et m’annonce: «Tu es démobilisé». C’est comme ça que j’ai commencé ma brève carrière diplomatique. Je dis brève parce que finalement aucun de ceux qui m’ont employé, en 55 ans de service, ne me donne un sou aujourd’hui. Je n’ai pas de retraite. Sauf celle que j’ai achetée quand j’étais en Afrique, où j’ai également acheté la sécurité sociale française en me disant que j’aurai ainsi une assurance médicale. Grâce à ça, je touche environ 550 euros par mois. Bref…

regard - Une fois au ministère, vous fréquentez un homme qui va beaucoup compter pour vous.

ND : Le frère de Camil Demetrescu, Victor Radulescu Pogoneanu, dit «Kiki». Un type admirable, génial, un héros. A moitié paralysé, il marchait avec deux béquilles. C’est l’homme qui m’a le plus impressionné dans ma vie. Il était le cousin d’Eugène Ionesco, parfois le génie est héréditaire… C’était un type d’un courage et d’une intelligence rares. C’est lui qui m’a converti définitivement à la démocratie, alors que j’étais plutôt de droite dans ma jeunesse, sympathisant de la Garde de Fer. Vous savez, on était nombreux, des gens bien, Eliade, Cioran, Alexandru Cioranescu… Une grande partie de la jeunesse roumaine a été envoûtée par le charisme extraordinaire de Codreanu, le chef du mouvement assassiné en 1938.

regard - Cette attirance était-elle purement intellectuelle ou avez-vous joint les gestes à la parole et fait le coup de poing comme beaucoup ?

ND : Non, pas du tout. J’étais à l’étranger, donc pas vraiment embrigadé. Quand j’ai été pris au service militaire, c’était déjà trop tard. Ils avaient assassiné Nicolae Iorga en novembre 1940, commis des horreurs une fois au pouvoir… J’avais compris que l’idéalisme était une chose et la pratique une autre. Sans compter que, malgré tout, le roi Charles II avait fait tuer les gens les plus valables du mouvement. Ceux qui restaient s’appuyaient sur le «chef élu», le fameux Horia Sima, une espèce d’agitateur loufoque. J’ai été définitivement «guéri» une fois entré au ministère grâce à Pogoneanu, qui m’a convaincu que le parlementarisme et la démocratie étaient l’avenir du monde entier. Je lui dois beaucoup.

regard - En 1944, on vous envoie à Stockholm, et votre vie bascule une nouvelle fois...

ND : Je faisais partie d’un petit groupe secret à qui on montrait des télégrammes qui n’étaient même pas divulgués au Secrétaire général et au ministre. Ils étaient destinés à ceux qui menaient en secret des négociations de paix à Berne, Lisbonne, Stockholm... Nous étions chargés de les leur porter en main propre. Chose impensable, le gouvernement Antonescu avait accepté qu’on ouvre des négociations à Stockholm avec les Soviétiques sans même en parler aux Américains. Antonescu ne jugeait plus les choses correctement. A l’issue de son avant-dernière rencontre avec Hitler, le 28 février 1944, à une époque où les Soviétiques étaient déjà très avancés, il revient à Bucarest et dit à la veuve d’Octavian Goga, Veturia, qui était une grande amie de sa femme: «Tu peux me baiser la main, Hitler nous rend la Transylvanie du Nord». Comment un chef d’Etat avec des responsabilités aussi énormes pouvait-il imaginer que les Allemands avaient encore leur mot à dire à ce moment-là? J’ai donc été envoyé à Stockholm pour reprendre les négociations, pas pour signer quoi que ce soit comme cela a été écrit. Sans aucune garantie de résultat, d’ailleurs.

regard - Mission difficile, voire absurde…

ND : Pourquoi Antonescu a-t-il envoyé un courrier diplomatique à Stockholm en sachant qu’il mettra deux jours pour simplement transmettre un message verbal alors qu’il n’avait qu’à faire un télégramme chiffré qui serait arrivé en cinq minutes? Je pense qu’il voulait faire traîner les choses et attendre un moment plus favorable. Mais lequel? Quoiqu’il en soit, le lendemain, la Roumanie se retourne contre l’Allemagne. Je suis nommé dans la foulée secrétaire d’ambassade à Stockholm. Le reste du personnel est rappelé, y compris l’ambassadeur. Il ne restait que le chargé d’affaires. Une ambassade squelettique succéda donc à une ambassade pléthorique. Le renversement d’alliance avait tout changé.

regard - Avez-vous bénéficié de la bienveillance de certaines personnes pour rester à Stockholm, sachant qu’une fois les communistes au pouvoir, vous avez été cité au procès de Iuliu Maniu, le leader national-paysan, et promis à une lourde peine de prison ?

ND : A la base, c’est un sale coup! Personne ne pouvait imaginer à l’époque ce qui allait se passer trois ans plus tard. Ceux qui m’ont envoyé à Stockholm l’ont fait sciemment. Si j’avais su que je ne pouvais pas revenir, je ne serais pas parti, je n’aurais pas laissé ma femme et mon enfant à Bucarest. Ca a gâché mon ménage. Mon épouse a fini par croire ce que des gens «bien intentionnés» lui ont dit: «Tu sais, Neagu, il savait qu’il ne pourrait pas rentrer…» Vous vous rendez compte, quels salauds. Ceci étant, vous savez, je n’ai toujours pas divorcé de ma femme, nous ne sommes que séparés depuis 45 ans.

regard - Quand prenez-vous la décision de ne plus revenir en Roumanie ?

ND : Entre septembre 1947 et début 1948.

regard - Vous passez vos premières années d’exil à Paris, où vous vous occupez des réfugiés roumains.

ND : D’un tas de choses, en fait. Même de ce que je n’ai pas avoué durant des décennies: entre 1952 et 1956, j’ai accepté de représenter le Comité National Roumain, qui était un simili gouvernement, ou plutôt une représentation de ce que nous pensions être la vraie Roumanie auprès des alliés du monde occidental, à New York. Les gens du Comité avaient accepté que l’un d’eux soit en relation avec la CIA et avec les services secrets français. Bêtement, mais c’était dans l’air du temps, je pensais que la troisième guerre mondiale était proche. Il y avait le blocus de Berlin, la guerre de Corée, etc. Je pensais que la mission que l’on m’avait confiée était importante. Finalement, c’était zéro. J’ai passé quatre ans là-dedans en faisant des choses que je regrette infiniment aujourd’hui. J’ai envoyé des parachutistes en Roumanie qui ont été fusillés, même si l’un d’entre eux a réussi à revenir en France. Avec le recul, cela n’a vraiment pas été une bonne affaire.

regard - Vous avez également collaboré à Radio Europe Libre.

ND : J’ai donné ma démission du Comité après m’être fâché contre les Américains, qui ne voulaient pas donner d’argent pour sauver un homme, Silviu Craciunar, que je pensais honnête mais qui s’est avéré vendu à la Securitate. Je me suis trouvé assez mal à ce moment-là. La seule chose que je souhaitais, c’était travailler à Radio Europe Libre, mais on me disait: «Tu sais, comme la radio est financée partiellement par la CIA, ils n’engageront pas quelqu’un qui est brouillé avec elle». Mais ils ne m’ont pas tenu rigueur de cette démission parce que j’étais parti de façon correcte. Trois mois après, on m’a répondu positivement, et j’ai pris la direction de Munich.

regard - Quels souvenirs gardez-vous de cette expérience ?

ND : Je n’ai pas aimé l’atmosphère là-bas. Dès que s’est présentée une occasion de revenir à Paris comme secrétaire général de la Fondation Carol Ier à l’Institut universitaire roumain, je l’ai saisie. J’ai toutefois gardé le contact avec Munich. Deux fois par semaine, j’improvisais une petite émission pour raconter ce qui se passait en France. J’ai travaillé pour Europe Libre près de cinq ans, dix-huit mois sur place à Munich et trois ans et demi à Paris.